Albert-Marie : un artisan des mots

Lettre à Hayat.

Marrakesh - La Ville des Roses. Crédit photo : www.paris-marrakesh.fr

PETITE  FILLE  CHÉRIE -  (Lettre à Hayat)

Tu m’as dit aimer lire en marchant. Et je t’ai vue lire en marchant. Attention, petite fille, c’est dangereux de lire en marchant : tu pourrais te blesser sur un poteau télégraphique ! Tu pourrais recevoir de plein fouet le choc d’un passant vulgaire, et cela te salirait. Mais non, finalement, je ne crois pas que tu aies à redouter de tels aléas triviaux ; je te sens assistée du Ciel. Je sens ta limpidité, ta transparence, ta pureté protégées. Va ton chemin de passante aux yeux baissés sur une lettre – baissés sur l’une de mes lettres – l’Amour divin te conduira toujours à bon port vers ton port.

Par contre tu peux être cabrée sans sommation par un mot, par mes mots, éclos sur une lettre que je tracerai pour toi et que tu liras en traçant ton chemin. Je te préviens, non pas pour étouffer mon effet de surprise, mais pour t’intriguer et te forcer à le redouter, à l’attendre, à le désirer, cet inattendu mot éclaté de mon cœur au chœur du mouvant émouvant de tes yeux.

Je t’ai dit, je t’écris que mes yeux, que mes mots te caressent. Il n’est pas innocent ce mode initiatique de communication. Les pensées – tu le sais, chacun sait – sont des ondes, sont des feux, des courants, des touchers qui émeuvent  la  matière. Exemple : cette  expérience  faite en laboratoire par des étudiants américains faisant sur un billard se mouvoir quelques boules seulement par la force de la pensée… Alors  songe aux milliers, aux millions de ces ondes invisibles projetées par l’amour d’un regard, par les ondes de la voix d’un amour invincible et rendu surpuissant par la divine, l’inestimable  et presque sacrée pureté bardée de platonicité ! Tu as  là des câlins, les câlins les plus forts à fortifier ton âme, à chatoyer ton cœur, à caresser ton corps. Les pensées tout d’amour font l’amour à ton cœur, à ton âme, à tes seins. Mais sans toute la trivialité de la chair ordinaire. Ah ! Que ne peut-on faire un enfant par l’action des pensées !

Tu n’es pas ordinaire. Je suis hors du commun, des silences, des compromis des morts-vivants. Mademoiselle, ma chérie, mon Hayat ; mais c’est de l’explosif que notre association -  si brève que, d’ailleurs elle se pourrait révéler être. Mais foin de tout ce qui semble une fin : tant qu’un cœur aime un cœur la vie est invincible. Et qui s’en va farouchement aimant la vie ne peut qu’indéfiniment vivre.

Un couple initiatique : l’un aidant l’autre pour avancer. Cela est tout-à-fait  flagrant  dans  le travail au quotidien. Pourquoi ne le serait-ce pas dans la poursuite de cette vie ? Tu ne peux imaginer la joie émue qui fait vibrer mon cœur lorsqu’un client me dit : « j’ai eu votre fille au téléphone… ». Ou bien encore : « c’est votre fille qui m’a reçu l’autre jour que vous n’étiez pas là ». Je voudrais vivre une semaine le rêve éveillé suivant : t’emmener quelque part hors de cette région, vers un site enchanteur, dans un hôtel quatre étoiles et te présenter comme ma fille ; te faire des cadeaux, aller acheter des robes pour toi et avec toi… Je suis si fier à tes côtés !

Et donc, quel est ce mal qui me ronge depuis quelques semaines ? Tu t’en es aperçu, tu es trop intuitive pour ne pas l’avoir vu. En bref : pourquoi ces larmes ? Alors voici la phrase, en voici la raison. Le 15 de ce mois j’écrivais à Céline, Céline d’ici et de si loin et Céline des deux Mondes : « En fait, Céline, il  m’arrive   une   chose   très   bizarre.  Depuis   quelques  semaines  j’ai  envie de pleurer… Je pense à toutes ces belles étudiantes que j’ai vu passer durant ces dix années. Et je me souviens du seul et véritable rêve de ma vie : avoir une fille.  Ce rêve aura duré deux ou trois décennies. Cette fille serait étudiante aujourd’hui… Parfois je suis triste à mourir avec ce regret. Bien sûr, cette tristesse ne me trouble pas toujours ; il y a des périodes. »

Et dans un autre e-mail à Céline, j’avance que je crois avoir trouvé ma fille adoptive.

C’est finalement au restaurant que nous avons le mieux communiqué. Au fait, je t’avais promis de traverser le parc de la Colombière avec toi et de revenir de l’autre côté par le bus 13. On pourra le faire un jour quand tu voudras. Au fait, et si l’on retournait à ce restaurant de la Colombière ? Je garde des souvenirs si forts de notre premier repas (sauf que cette fois-ci tu choisiras des plats à la carte et rigoureusement dépourvus de la moindre trace d’alcool)…

Je t’embrasse tendrement et te donne en pensées tous les câlins que je ne puis encore te faire. Et pour ce qui est de l’argent : si je pouvais t’en offrir autant que j’ai d’amour pour toi, tu paierais l’impôt sur les grandes fortunes…Tu as été celle par qui l’évènement est arrivé : ma découverte des étonnantes richesses – humaines, culturelles et spirituelles - des pays arabes, et mon désir, arrêté, de me rapprocher considérablement de tes compatriotes. Merci, Petite Fille chérie, d’avoir créé un tel événement dans ma vie et de m’avoir laissé entrevoir la grande allée ouverte sur la  possibilité d’une telle Vie sans frontière !

En remerciement, je t’ai mis le pied à l’étrier pour ce qui est du domaine professionnel. Fais-en  bon  usage : ne  perds  pas ton âme en la prostituant au creuset grumeleux et fétide des bas intérêts de ce monde qui va passer beaucoup plus vite qu’on ne le pense… Et souviens-toi toujours de l’un de mes enseignements : rendre le mal pour le bien reste hélas l’erreur,la faute, le péché qui demeure le plus difficilement pardonnable par Dieu (quelque nom que tu puisses Lui donner !). Lors de cet été 2009, tu auras gagné plus  d’argent par mes dons que ne t’en a rapporté la maigre gratification de tes employeurs.  Attention au danger que mon geste pourrait représenter pour toi ! Les Mathématiques divines étant irréversibles : l’on récolte toujours ce que l’on a semé – et de plus en plus rapidement par ces années troubles qui nous enlèvent au grand galop vers les voies inattendues et grandioses du Monde nouveau ! Et si je ne dois jamais te revoir sur cette planète Terre, ce sera dans l’Autre-Dimension. Sois heureuse et fais pour le mieux !

Dijon, Septembre 2009

(Extrait de « CŒUR SANS FRONTIÈRE »

www.nicolas-sylvain.jimdo.com

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